Vincent Bolloré, milliardaire autoproclamé champion de la « liberté », orchestre une entreprise de censure aussi sophistiquée que glaçante. Une enquête révèle que plus de 500 journalistes ayant quitté ses médias – Canal+, Europe 1, Le Journal du Dimanche (JDD), Paris Match – sont liés par des clauses de « loyauté » et de « non-dénigrement » à vie. Ces chaînes invisibles les empêchent de parler de Bolloré, de ses entreprises ou de leurs pratiques internes. Mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg : en contrôlant une part significative de l’information en France, Bolloré ne se contente pas de museler les voix dissidentes ; il sculpte le récit national à sa guise, menaçant directement la démocratie.
Un empire médiatique au service d’un agenda
L’empire Bolloré s’étend comme une toile d’araignée sur le paysage médiatique français. De Canal+ à Europe 1, en passant par Le JDD et Paris Match, ses acquisitions ont transformé des institutions historiques en porte-voix d’une idéologie conservatrice, souvent alignée sur ses intérêts personnels et politiques. Ce n’est pas seulement un rachat d’entreprises : c’est une prise de contrôle de l’information elle-même. À coups de purges éditoriales, de pressions sur les rédactions et de nominations de fidèles, Bolloré impose une ligne éditoriale où le débat est étouffé, les enquêtes critiques écartées, et les voix discordantes marginalisées. Ce faisant, il ne se contente pas de posséder des médias ; il façonne l’opinion publique, orientant le discours public vers ses propres objectifs.
Un bâillon à vie pour étouffer la vérité
Les clauses imposées aux journalistes ayant quitté ses médias sont la cerise empoisonnée sur ce gâteau totalitaire. Depuis 2016, ces contrats interdisent à vie de parler de Bolloré, de ses sociétés ou des coulisses de ses rédactions, sous peine de sanctions financières écrasantes. Jean-Baptiste Rivoire, ancien de Canal+, en a fait l’amère expérience : pour avoir dénoncé les dérives de son ex-employeur, il a été condamné à rembourser 151 500 €. Ce n’est pas de la protection d’intérêts commerciaux ; c’est une vendetta contre la liberté d’expression, un moyen de s’assurer que nul ne puisse révéler les manipulations internes ou les pressions exercées sur les journalistes. Avec plus de 500 professionnels réduits au silence, Bolloré construit un mur d’omerta autour de son empire.
Une menace systémique pour la démocratie
Ce double jeu – contrôler l’information et bâillonner les critiques – est une attaque frontale contre le pluralisme et la démocratie. En monopolisant une partie significative de l’information en France, Bolloré ne se contente pas de limiter ce qui peut être dit dans ses médias ; il empêche aussi la révélation des mécanismes par lesquels il impose sa vision. Ces clauses à vie ne protègent pas seulement ses intérêts ; elles privent le public d’une information libre et indépendante, essentielle à une société démocratique. Quand un seul homme peut à la fois façonner le récit médiatique et interdire toute critique de ses méthodes, c’est la vérité elle-même qui devient otage.
Le cynisme d’un faux apôtre de la liberté
Bolloré a l’audace de déclarer que « la liberté coule dans [ses] veines ». Ce cynisme est une insulte à tous ceux qui croient en une presse libre. Sa liberté, c’est celle d’un potentat qui impose sa loi, celle d’un milliardaire qui achète le silence et manipule l’information. Chaque clause signée, chaque amende infligée, chaque rédaction muselée est une preuve de son mépris pour les valeurs qu’il prétend défendre. Ce n’est pas de la liberté qu’il promeut, mais un totalitarisme médiatique où l’argent dicte la parole.
Un sursaut nécessaire
Face à cette mainmise sur l’information et cette censure organisée, il est urgent de réagir. Les clauses de non-dénigrement à vie sont une aberration éthique et juridique, incompatibles avec les principes d’une presse libre. Les autorités, les syndicats de journalistes et les défenseurs des droits humains doivent exiger leur abolition et des sanctions contre ceux qui les imposent. Les citoyens, eux, doivent soutenir une presse indépendante, refuser la normalisation de ce contrôle autoritaire et faire entendre leur voix.
Vincent Bolloré pense pouvoir acheter le silence et modeler l’information à son image. Mais la vérité ne se vend pas, et la liberté ne s’incline pas devant les milliards. À nous de résister, de dénoncer, et de rappeler à ce magnat que la presse française ne peut pas être « son jouet ».